Observation de cétacés : La route des Baleines à Tadoussac
Observer les baleines en milieu naturel…nous sommes nombreux à en rêver, sans trop savoir où, quand, comment c’est possible. Avant de venir vivre au Québec, je ne savais pas encore que cette expérience hors du commun était réalisable à quelques heures de Montréal.
C’est lors d’un road-trip en Gaspésie que j’ai saisi l’occasion de vivre ce moment magique, juste avant de faire le tour de la péninsule. Nous sommes allés à la rencontre des cétacés du Saint-Laurent, un lieu mondialement connu pour ses nombreuses baleines, et nous n’avons pas été déçus du voyage…
Je t’emmène donc sur la route des baleines à Tadoussac, prépare-toi à une virée pleine d’émotions !
Une chance immense. C’est vraiment comme ça que j’ai vécu cette opportunité d’aller à la rencontre des mammifères majestueux qui peuplent les eaux de cette partie du Saint-Laurent, le temps d’une saison magique.
Un moment aussi unique que précieux, à ne pas prendre à la légère non plus. Je vais te raconter ma propre expérience, mes questionnements, et découvertes. Et partager avec toi ma rencontre inoubliable avec ces géants des mers.
La route de Montréal jusqu’à Tadoussac
Environ 500 km séparent Montréal de Tadoussac, en comptant une courte traversée de la rivière Saguenay en bateau. Pour nous, cette première étape marquera le début de notre road-trip qui nous emmènera faire le tour de la Gaspésie.
Bien sûr, prévoir une activité le jour-même de cette longue route n’était pas le meilleur choix. Ca sera donc une nuit dans une auberge à l’arrivée pour l’observation des baleines dès le lendemain matin.
Notre organisation pour ce premier jour de route ?
– Départ prévu autour de 9h à Montréal.
– Rejoindre la rive nord en embarquant dans un bateau traversier depuis la baie de Sainte-Catherine jusqu’à Tadoussac. Le trajet lui-même est déjà une invitation au voyage et au dépaysement.
– Dormir dans le village Les Escoumins.
– Excursion en Zodiac le lendemain matin.
La traversée Baie de Sainte-Catherine – Tadoussac en bateau
La traversée est gratuite et ne dure que quelques minutes. Mais quelles jolies minutes… On embarque directement avec sa voiture sur le traversier, et on la quitte pour profiter du court voyage à l’air libre.
Le jour décline et c’est sous ma lumière préférée que nous glissons sur l’eau, espérant déjà y voir le frémissement d’une baleine qui viendrait déjà affleurer. Pour ça, il faudra attendre encore un tout petit peu.
Le vent frais et marin dans les cheveux et le port qui s’approche déjà ouvre le bal de ces 9 prochains jours de belles découvertes. Chaque minute se savoure donc, et les reliefs qui entourent l’eau donnent un air de fjord Scandinave.
Il est déjà temps de regagner sa voiture et retrouver la terre ferme, coté nord, pour poursuivre l’exploration et atteindre notre auberge pour la nuit.
De Tadoussac aux Escoumins
La dernière demi-heure de route de la journée se fait vite, et nous avons tous hâte de nous poser dans un endroit tout neuf. L’auberge « Chez Claude » est tenue par un couple (qui ne vit en fait pas sur place) et promet d’être authentique.
C’est en effet dans un cadre familial et accueillant que nous arrivons. La maison se divise en plusieurs chambres, avec deux salles de bain communes. Un salon chaleureux et rustique, une salle à manger commune et une cuisine ouverte complète le tout. À notre arrivée, nous appelons le propriétaire qui vient nous accueillir quelques minutes plus tard. La précieuse clé en main, nous découvrons notre chambre et ses deux lits doubles. La salle de bain est juste en face, propre et assez spacieuse.
Nuit à l’auberge et beaux rêves de baleines
Pour ce soir, la longue route me donne envie de rester ici et de profiter de la cuisine pour me préparer un repas sur place. Manger ensuite au salon, dans un des canapés confortables me donne l’impression de rendre visite à une vieille tante québécoise. La maison est calme, on est seuls et tranquilles et je profite de ce moment. Je suis fatiguée, j’ai envie de me coucher tôt. Je dormirai finalement difficilement quelques heures. Demain, une magnifique journée nous attend, et elle commencera dès 9h chez les Ecumeurs du Saint-Laurent.
Après cette courte nuit, un solide déjeuner avec toasts, oeufs, crêpes et confitures maison nous attend. Le moment aussi de chercher désespérément un cachet contre le mal de mer : on n’est jamais trop prudents, pensez-y à l’avance (pas comme moi donc) si vous êtes sensibles à ce genre de soucis !
Nous avons opté pour l’excursion en zodiac, malgré mes hésitations et réticences de prime abord. Je t’explique en détails comment faire ton choix, mais avant, je te propose d’en savoir plus sur nos héroïnes du jour.
Les baleines et le Québec
L’estuaire et le golfe du Saint-Laurent constitue un des meilleurs lieux au monde pour l’observation des baleines. Une chance incroyable, mais également une grande responsabilité de préservation de ces animaux fascinants.
La typologie particulière des côtes ainsi que la richesse des eaux en nutriments offre aux mammifères marins un lieu de choix. L’estuaire brasse des grandes quantités d’eaux froides et riches en oxygène : des conditions idéales pour le plancton et le krill à la base de leur alimentation.
Au printemps, de nombreuses espèces quittent donc leur immense océan Atlantique pour venir faire le plein de nourriture avant de revenir après l’automne dans leurs zones de reproduction.
On retrouve 13 espèces selon les périodes dans le Saint-Laurent, mais certaines sont très rarement observées. D’autres sont malheureusement en voie d’extinction comme la baleine à bec commune et la baleine noire.
Le béluga, véritable emblème de la région, est présent à l’année dans le Saint-Laurent. Il est cependant lui aussi très menacé.
On appelle Route des Baleines les quelques 800 km depuis Tadoussac jusqu’à Natashquan (voire jusqu’à Blanc Sablon). Une route qui offre des zones d’observations uniques et privilégiées pour des rencontres assurées et fascinantes avec le monde des cétacés.
Mais d’ailleurs, pourquoi parle-t-on parfois de cétacés, baleines, ou rorquals ?
La différence entre cétacés, baleines et rorquals ?
On utilise de façon générale le terme « baleine » pour désigner tout ce qui y ressemble, mais il existe des subtilités dans le monde des mammifères marins.
Pour résumer, toutes les baleines sont des cétacés.
Mais parmi elles, on distingue :
– Les baleines à dents, telles que les dauphins, marsouins, bélugas, épaulards et cachalots.
– Les baleines à fanons, telle que la baleine noire. Ces espèces de grands « balais » en kératine qui permettent de ne laisser passer que les éléments nutritifs de l’eau.
– Les rorquals rentrent dans la définition de baleines à fanons, mais ont la particularité de posséder des sillons ventraux et une nageoire dorsale.
Le terme rorqual vient d’ailleurs du norvégien et signifie baleine à tuyaux ou à ventre plissé. Une référence directe à leur méthode de « chasse » : les rorquals déplient leurs sillons pour engouffrer des quantités énormes d’eau et filtrer ainsi le krill, plancton et petits poissons.
Observation des baleines et éthique
Ce point précis a donné lieu à de vrais questionnements pour moi. Car on peut (et doit) véritablement se demander si, au-delà du choix de l’entreprise, il existe une façon totalement éthique d’observer les baleines en mer.
Que cela plaise ou non, la réponse la plus honnête est non.
Pourquoi ? Tout simplement car toute activité humaine, notamment en bateaux et zodiacs, est potentiellement source de dérangements pour les mammifères marins. Il convient pourtant d’être un peu plus mesurée et je vais tâcher d’être la plus objective possible.
Tout d’abord, de quels dérangements parle-t-on exactement ?
Dérangements causés par les bateaux d’observation :
Pollution sonore :
Le bruit des moteurs, à multiplier par le nombre d’embarcations, est un problème certain. Le monde marin et ses fragiles animaux n’est pas en soi un monde du silence. Ses habitants communiquent, se repèrent et socialisent en utilisant des sons et un langage ultra-sophistiqué. Pas besoin de pousser loin la réflexion pour se douter que tout bruit parasite viendra entraver cette communication, et déstabiliser les animaux.
C’est un problème majeur auquel on ne pense pas, mais nous avons rendu les océans assourdissants. Des nuisances et des souffrances terribles en découlent. Les bateaux d’observation ne sont malheureusement qu’une infime partie du problème.
Gêne, distractions et collisions :
Les va-et-vient des bateaux et leurs trajets peuvent constituer une gêne « mécanique ». Les cétacés viennent se nourrir dans les eaux riches en plancton de la baie. Ils plongent de longues minutes et remontent à la surface respirer. En étant le plus prudents possibles, en coupant les moteurs, les risques de collisions sont extrêmement réduits, mais des bateaux circulent et restent en surface sur les terrains de « chasse » des rorquals.
Nous sommes de facto des intrus sur leur territoire, point. Des intrus bruyants, potentiellement dangereux, et polluants…
De même, les Kayaks également sont une source potentielle de dérangement. Tout ce qui peut détourner l’attention des rorquals et des bélugas et les dévier de leurs activités quotidiennes et essentielles pose problème.
Connaitre pour mieux protéger
Outre son aspect économique indéniable, l’observation de baleines en mer reste malgré tout un moyen de développer les connaissances du grand public. Encadrée et bien réglementée, la rencontre avec ces animaux et la fascination qu’ils exercent participent à renforcer le désir de protection. De façon imparfaite et paradoxale peut-être, cela peut et doit contribuer au désir de conservation de ces écosystèmes fragiles. Cependant, cela éveille toujours en moi ce sentiment ambivalent, cette culpabilité qui me suivra, harnachée au bateau.
Les différentes façon d’observer les baleines
Pour prendre ta décision, je te conseille de considérer plusieurs éléments. Si tu t’intéresses à l’observation de cétacés, j’ose espérer que leur sort te questionne, voire te préoccupe, et que tu réalises bien l’aspect exceptionnel de cette activité.
Voici les différentes façons de les rencontrer, que tu souhaites ou non les observer en mer.
– Observation depuis la berge
Si tu souhaites avant tout n’avoir pas le moindre impact sur elles, bravo et bonne nouvelle : tu peux en voir depuis la rive, y compris très près des côtes. Il existe des points d’observation privilégiés, tout autour de la région. Qu’ils soient totalement « naturels » ou aménagés avec des Centres d’observation et d’Interprétations officiels.
Un peu de patience, du calme, un regard affuté (complété pourquoi pas d’une paire de jumelles) et tu as toutes les chances d’être récompensé, notamment à partir de juillet jusqu’en octobre.
En haute saison, des naturalistes seront justement présents sur les sites pour t’aider et te conseiller.
Parmi les spots d’observation à privilégier :
- Le Cap-de-Bon-Désir aux Bergeronnes
- Le sentier de la Pointe de l’Islet à Tadoussac, et tout le long de la promenade jusqu’au centre d’interprétation
- Le centre d’interprétation de Pointe Noire, à l’embouchure de la rivière Saguenay
Tu l’as vu, la route des baleines est longue et les spots se multiplient en quittant Tadoussac. J’aurai par exemple l’occasion de revoir des baleines au Parc Forillon lors de la suite du road-trip…
– En Kayak
C’est le choix que je souhaitais privilégier avant tout…Et je n’ai pas dit mon dernier mot ! Oui, je le reconnais, le côté « groupe » a joué sur ma prise de décision. Je m’étais déjà informée depuis pas mal de temps sur l’impact des observations en mer, et le choix du kayak me semblait le meilleur compromis, entre sensations fortes, écologie et silence.
Les « écotours » proposés par Mer et Monde, notamment leurs sorties « Sons et Lumières », des sorties nocturnes avec hydrophones m’attirent tout particulièrement.
Comme évoqué plus haut, j’ai tout de même appris que non, le silence des embarcations n’en fait pas la solution exempte de toutes potentielles nuisances. Les cétacés, et les bélugas notamment, peuvent se montrer très curieux et intrigués par ces objets insolites glissants à la surface. Les Kayaks peuvent les « distraire » et les détourner de leurs activités de nourrissage par exemple et impacter ainsi leur quotidien. Les animaux peuvent également ne voir qu’au dernier moment les frêles embarcations, notamment lors de leurs remontées pour respirer.
– En Zodiac ou bateau
L’activité la plus séduisante pour le grand public, la plus développée et plébiscitée. Riche en sensations fortes, proche des éléments, notamment lorsque l’embarcation est plus petite.
J’ai éliminé d’office l’option bateau, plus grand, plus bruyant, qui accentue l’aspect « croisière » que je voulais à tout prix éviter.
Après avoir cédé à la tentation d’un zodiac 12 places, j’ai cherché le choix le plus éthique.
Justement, comment choisir son entreprise d’excursion pour observer les baleines ?
Choisir un membre de l’alliance Eco-Baleine
En faisant quelques recherches sur les différents organismes qui proposent des excursions, je découvre rapidement l’alliance Eco-Baleine. Cette organisation pousse plus loin les standards des observations grâce à une série d’indicateurs rigoureux. Elle regroupe des entreprises d’excursions, le Groupe de recherche et d’éducation sur les mammifères marins (GREMM), la Sépaq et Parcs Canada.
Sans effacer les stress potentiellement occasionnés par l’activité, tu peux au moins contribuer à favoriser des démarches éco responsables et à encourager tous les efforts qui pourront aller dans ce sens. Toutefois, être membre de cette alliance n’enlève pas pour autant toutes nuisances possibles.
Garde en tête qu’il s’agit d’une assurance supplémentaire, mais une telle démarche n’est pas forcément motivée uniquement par le bien-être animal. Ainsi, une des entreprises les plus populaires et critiquées fait partie de l’alliance…
Une réglementation pour contrôler l’impact humain
Heureusement, toutes les compagnies qui organisent des excursions en bateau sont tenues aux mêmes réglementations. Par exemple, pas de poursuites des animaux, par de rapprochements intempestifs. Une distance de 100 m est requise pour les rorquals, 400 m pour les Bélugas et la très rare baleine bleue. Sur le papier, c’est bien joli, mais les rorquals ne sont pas forcément au courant, vois-tu, et leur liberté inclue justement qu’ils vont et viennent comme ils le souhaitent. Quitte à se rapprocher bien plus des embarcations immobiles présents sur leur chemin.
Pour faire notre choix, nous avons hésité entre Essipit, et leur culture Innue (un des peuples autochtones des régions de la Côte-Nord et du Saguenay–Lac-Saint-Jean), et les Ecumeurs du Saint-Laurent, petite entreprise familiale.
Les deux proposant des excursions en petits zodiacs semi-pneumatiques. C’est finalement les disponibilités qui décideront pour nous : ça sera les Écumeurs !
Notre excursion en zodiac avec les Ecumeurs du Saint-Laurent
Nous avons rendez-vous sur le site des Escoumins, où se trouvent leurs locaux. Et pour nous rendre sur le quai, c’est dans un des fameux bus d’écoliers jaune que ça se passe ! Cool !
Coté tenue, j’ai rajouté un bonnet et une fine doudoune à capuche sur mon t-shirt manches longues. Une veste de flottaison orange et bien rembourrée nous est fournie. Pour la version estivale, c’est largement suffisant.
Je prends place sur l’embarcation, le soleil est au beau fixe, et moi aussi. J’ai du mal à réaliser que je vais sans doute observer des animaux magnifiques dans leur milieu naturel. Seront-ils vraiment là ? Nombreux ? Une baleine va-t-elle sauter par-dessus le zodiac dans un geyser d’écume ? (oui, bon…)
Ça y est, c’est parti, les moteurs sont en route et on file sur l’eau, direction le point d’observation commun à toutes les compagnies.
En chemin, le regard se fait déjà avide, on scrute la mer comme jamais, conscient de ce qu’elle abrite. Et nous sommes déjà récompensés : des têtes de phoques affleurent, curieuses et irrésistibles. Wahou, ça promet, je suis déjà très, très heureuse. Le genre à taper dans les mains de façon incontrôlable et crier ouiiiiii. Tu visualises ?
Pas le temps de s’attarder, le zodiac poursuit sa course sur le Saint-Laurent, nous voilà arrivés…
Et là, le spectacle commence. Un dos lisse, brillant sous le soleil apparait déjà à la surface, re glissant gracieusement sous la surface. Je viens vraiment de voir un rorqual ? Le capitaine est ultra enthousiaste et s’exclame. Ouaip. La route des baleines passe clairement par là.
A la rencontre des baleines
C’est parti pour un festival merveilleux de rencontres uniques. Tout le jeu est de laisser son regard glisser sur l’horizon pour mieux capturer de l’œil les frémissements ou le souffle d’un rorqual qui s’annonce. Tu vois ce sentiment quand tu te retrouves sous un ciel étoilé plein de promesses ? Le regard qui balaye tout ce qu’il peut, espérant saisir au vol une étoile qui a la bonne idée de filer tout là haut. Et bien c’est ce même genre de quête, mais la mer est encore plus généreuse.
Les rorquals vont se multiplier et nous proposer un ballet fascinant, chacun avec leurs spécificités car oui, nous en verrons de plusieurs espèces. Le capitaine nous donne des informations précieuses en temps réel pour nous aider à les reconnaitre nous aussi.
Les espèces de baleines observées dans le Saint-Laurent
Petits rorquals, rorquals communs et rorquals à bosses seront nos hôtes aujourd’hui ! Le site de Baleines en direct est une mine d’informations et permet d’en apprendre énormément sur les mammifères marins ainsi que leur présence et comportement. Voici un petit résumé des espèces observées lors de notre excursion.
Petits rorquals
De taille moyenne 6 à 9 m. Son souffle est peu ou pas visible, tu verras directement son dos noir et sa nageoire dorsale courbée. Pas toujours facile cependant de le reconnaitre du premier coup d’œil pour le regard néophyte ! Son comportement dynamique peut l’amener à effectuer des sauts hors de l’eau (appelés breach ).
Rorquals communs
Déjà bien plus grand que son petit cousin, sa taille est de 18m à 21m, son souffle bien visible. Sublime, imposant, gracieux…et rapide ! On le surnomme même le lévrier des mers. Nous avons eu la chance d’en voir plusieurs.
Rorquals à bosse
De taille moyenne, entre 11m et 13m, c’est celle qui offre un spectacle émouvant et dont on voit la queue iconique lorsqu’elle replonge sous la surface. Elle aussi peut bondir hors de l’eau, aussi imposante et impressionnante que gracieuse.
Les cinq sens en éveil lors de l’observation de baleines en mer
Lors d’une observation de baleines, tous les sens sont en éveil, et l’émerveillement total.
La vue, bien sûr, sollicitée constamment. On regarde partout à la fois, on saisit le moindre mouvement, et on se délecte des nombreuses « récompenses ». L’observation de baleines est un spectacle exceptionnel pour les yeux et les souvenirs se gravent automatiquement. Tu n’oublieras jamais la vision de ces géants des mers nageant en liberté. Les couleurs, les textures, les brillances et les reflets, toutes les subtilités dont tes yeux se nourriront.
L’ouïe, avec ses souffles impressionnants qui diffusent leurs milliers de fines gouttelettes dans les airs. Ces nuages restent longtemps en suspension, et entendre ainsi cette respiration si puissante, juste là à nos côtés est vraiment une sensation unique. Outre le clapotis de l’eau, le vent et les oiseaux, tu entends donc cette respiration aussi furtive qu’intense. Pas de chant des baleines pour cette fois-ci. Sûrement un des sons les plus mystiques qu’il est donné d’entendre. Une musique pour l’âme, qu’on l’entende ou non finalement.
Le toucher, ces mains qui deviennent moites. Cette embarcation qui devient notre petit ilot auquel on se cramponne au beau milieu de ces animaux majestueux qui dansent autour de nous. Et si l’un deux décidait de nous renverser, fatigué d’être ainsi observé ? Plonger au milieu des baleines, les toucher et rencontrer cette peau lisse ou rugueuse, recouverte de petits coquillages (comme des balanes, petits crustacés parasites)…Il y a aussi le vent marin, le froid, sur le visage, les gouttelettes d’eau de mer. Sensations qui te rappellent à la réalité de ton rêve éveillé.
L’odorat n’est pas en reste ! Et oui, ce fameux souffle des baleines, quand il est vraiment près, dégage une odeur bien particulière. Difficile à décrire, un peu souffrée, un peu marée, pas agréable mais magique, car si nouvelle et rare. Qui peut vraiment se targuer d’avoir véritablement senti une baleine ?
Un peu de sel
Il ne manquerait plus qu’une larme salée, qui viendrait discrètement disparaitre sous la langue pour compléter du goût le tableau des cinq sens. Et crois-moi, c’est loin d’être improbable…Qu’il s’agisse d’un trop-plein d’émotions ou d’une goutte d’eau de mer, un peu de sel pourrait bien se rajouter à l’expérience.
Au bout d’un certain moment, les rorquals se font encore plus présents. Le plus incroyable ? Quand une apparition soudaine se fait juste à côté du bateau, faisant partie des surprises possibles même si rien n’est fait pour la provoquer. Le calme est de rigueur, mais l’excitation et l’adrénaline sont au maximum. Un moment magique et très impressionnant.
Le capitaine lui-même laisse échapper des « c’est malade !! » qui donnent encore plus le sourire. On sent que l’on est dans un jour généreux, et même si on a cette certitude de ne jamais pouvoir se lasser, il faut bien repartir, comme on est venus, mais beaucoup plus riches.
Retour à Tadoussac
Les moteurs se rallument, nous glissons rapidement sur l’eau, l’air marin plein les poumons. Le soleil brille, la tête est ailleurs, les pensées dansent encore parmi les rorquals. Au bout de quelques minutes, là, des taches blanches étincellent à la surface : mais oui, ce sont les fameux bélugas ! Furtif passage qui ne sera pas relevé par le capitaine. Ces animaux rares et fragiles ne doivent pas être approchés je te le rappelle, et cette vision précieuse restera évanescente alors que l’on poursuit notre course retour.
Je remercie quand même la nature pour ce cadeau supplémentaire.
Visite du Centre d’Interprétation des Mammifères Marins – CIMM
De retour sur la terre ferme, nous échangeons entre nous, rorquals par-ci, rorqual par là, et tu te souviens quand elle est passée juste à côté ? Difficile et inutile de passer et de penser à autre chose. D’ailleurs, après un lunch au Pick-Up Grillé (sympa et décontracté, mais cher, comme c’est le cas partout à Tadoussac), nous décidons de prendre une petite dose supplémentaire en visitant l’éco musée qui fait face à la mer.
Fasciner et sensibiliser, voilà la principale mission du Centre d’interprétation des mammifères marins (CIMM). Idéalement situé au bord de l’eau, près de l’embouchure de la rivière Saguenay et du Fleuve Saint-Laurent. Pour le repérer à Tadoussac, cherche la jolie maison en bois blanc et bleu, et les sculptures de bélugas.
L’entrée te coûtera 14 dollars, taxes comprises. Un peu onéreux, mais tu contribues ainsi à développer ce lieu de recherche.
Le lieu est petit, mais intéressant et riche en informations. J’ai pu en profiter pour rencontrer des naturalistes et leur poser des questions suite à mon observation en mer. J’ai ainsi appris qu’aucune nouvelle entreprise d’excursions n’est à présent autorisée. Le but est de conserver uniquement celles existantes, pour ne pas saturer plus qu’il ne l’est le Saint-Laurent. De même, certaines de ces entreprises donnaient à l’origine plutôt dans la chasse à la baleine, avant son interdiction en 1979. Charmant.
Enfin, nous avons l’occasion de visionner un film documentaire relatant l’histoire vraie d’un Béluga perdu loin de son groupe. Une magnifique plongée dans le monde de ces animaux incroyablement attachants, sensibles et intelligents.
Traversée Les Escoumins/Trois Pistoles en bateau
Après la visite, nous profitons d’une nouvelle observation providentielle de rorquals depuis la berge/terrasse du musée. Mais il est déjà temps de dire au revoir à ce village unique en son genre qui nous aura donné tellement de souvenirs.
Une nouvelle traversée nous attend, direction la ville de Trois-Pistoles, pour de nouvelles aventures en terres gaspésiennes cette fois.
C’est de nouveau à l’heure où le soleil rougit le ciel que nous profitons chacun de cette mini croisière d’1h30. Un moment d’introspection sur ce généreux Saint-Laurent qui nous accompagnera fidèlement chaque jour.
Instant de calme, où je regarde flotter ces drapeaux du Canada et du Québec jusqu’à ce que mes yeux se ferment quelque peu. Courte nuit, tu te rappelles…
L’arrivée se fait avant la nuit, et les maisons colorées de la côte nous accueillent. Nous sommes à présent en Gaspésie. Et j’ai hâte de te raconter la suite.
13 Comments
Jerry Kan
De la première à la dernière ligne, tu nous offres un récit tellement prenant et passionnant à tous points de vue. Le récit d’une rencontre exceptionnelle et magique et tu nous donnes l’impression d’y être avec toi. Merci ! ✨?
Marge
Merci beaucoup pour ce beau commentaire. Vraiment heureuse si je parviens à t’emmener avec moi. Merci encore pour ces mots motivants.
Tom Devache
Hello Marjorie
Tu es comme une encyclopédie mais en beaucoup plus passionnante . Je ne savais pas que les dauphins étaient des baleines à dents.
Apparemment tu n’as pas vu de dauphin, viennent ils à une certaine période, ou ce n’est pas du tout leur territoire ?
D’où vient ton amour et même ta compassion pour les animaux ?
À plus
Marge
Salut Tom !
Merci beaucoup 🙂
Concernant les dauphins, je n’en ai pas vu, mais on peut quand même en observer entre le printemps et l’automne. Le Dauphin à flancs blanc est plus abondant dans le Saint-Laurent que celui à nez blanc, et on a plus de chances de les voir dans le Golfe que dans la partie l’estuaire où ils restent exceptionnels . Quand ils sont là, on ne peut pas les louper en tout cas : ils sont en bancs et super actifs.
Concernant mon amour des animaux, il remonte à toute petite. J’étais du genre creuser des trous au milieu des cailloux pour faciliter le passage des fourmis (va savoir comment je pensais à ça) au lieu de les écraser 🙂
Ensuite, j’ai carrément créé un club puis tentative d’association au primaire et collège sur la thématique de la protection des animaux/de la nature.
Mais je pense qu’heureusement, la compassion envers les animaux peut se produire plus tard, il y a (presque) toujours du mieux possible. Comme souvent, ça peut passer par l’information, la compréhension. Mais la sensibilité aide pas mal aussi !
Tom
hello Marjorie
Merci pour les réponses .Je trouve que cétacés bien fait comme article ?,désolé çà me fait rire , j’espère que personne ne l’aura fait avant moi !
A plus
julie
cool !!
Marge
Contente que ça t’ai plu 🙂
Mina
Ma perle,
Quand tu m’as dis que tu partais observer les baleines , je me suis dis quelle chance !
Le récit que tu nous délivre est simplement passionnant ,
Extrêmement instructif , et d’une grande intensité ,
Des l’ instant où tu mets les pieds sur cette embarcation , on sent bien que tu vas vivre quelque chose de fort , j’ai l’impression que tu pars à la découverte d’un trésor,
Et oui ces cétacés ce sont des trésors , que nous devons protéger et ton témoignage nous le rappel , bravo pour ce moment intense que tu m’as fais vivre ,
Bravo pour ce temoignage magistral,
Gros bisous,
Ta Maman .
Marge
Merci beaucoup ma Mina pour ce beau commentaire. J’ai pris tellement de plaisir à écrire cet article. C’est tellement important pour moi de transmettre cette joie que j’ai ressenti mais aussi toutes mes questions, et tant mieux si on ressent ce coté trésor. car comme tu le dis, ce sont vraiment des trésors. J’espère qu’on pourra en voir ensemble un jour !
Gros bisous
Mina
Oui ma fille, les récits que tu livres sont véritablement patronnants , comment ne pas avoir envie de te suivre,
J’ai tellement hâte de te retrouver au Canada ,
Moi aussi j’ai toujours rêvé d’approcher ces merveilles
Je ne peux espérer meilleur guide ,
Bisous fort .
dark valkyrie
tout simplement magnifique!
tu as raison, on ressort plus riche d’une rencontre comme celle-là ♥
je suis heureuse pour toi.
Marge
Merci beaucoup Valk ça me fait vraiment plaisir. C’est un moment indescriptible mais que je me suis efforcée de décrire quand même 🙂 Et ça comptais beaucoup pour moi que de partager ça.
Gafner Angélique
Hello Marjorie,
En cheminant dans mes recherches pour notre observation des baleines qui aura lieu à la mi-septembre de cette année, je suis tombée sur ton blog. Et ouah quelle belle surprise. Tu m’as embarqué avec toi, je pouvais même imaginer les images. J’aime ta narration. C’est très bien écrit. Merci pour ces partages si inspirants. Nous allons partir du même endroit que vous avec un zodiac hybride 12 places. Vous étiez allé à quelle heure? La 1ère sortie du matin vers 9h ou 10H? Nous resterons 1 mois en le Sagunenay/Lac St Jean, la Gaspésie, la ville de Québec et juste 3 jours du côté de Joliette pour visiter une amie. Je vais maintenant lire d’autres articles de tes voyages et j’ai déjà enregistré le lien de ton blog dans ma barre des favoris. Hâte d’en découvrir plus.
Nous vivons en Suisse et nous sommes beaucoup en montagnes.
Je te souhaite le meilleur pour tes futures aventures.
Cordialement.
Angélique